Axe intestins-cerveau-peau : jamais deux sans trois !

Par Joanie Bouchard, naturopathe et bio-esthéticienne

Le lien entre le microbiote intestinal et le cerveau est une notion bien connue de tous ceux et celles s’intéressant moindrement à la santé au naturel. Il n’est plus à prouver que la santé intestinale a un impact notable sur la santé cérébrale et vice versa. 

Ces deux entités communiquent de façon bidirectionnelle par un réseau complexe de molécules, bien que le microbiote intestinal en soit l’acteur principal. Néanmoins, en ajoutant un troisième élément à cet axe, la peau, il est possible d’obtenir des explications très intéressantes quant à certaines problématiques cutanées, pour ne pas dire la grande majorité. 

Quel lien existe-t-il entre ce troisième greffon et les deux d’origine? Comment le cerveau et le microbiote intestinal influencent-ils la santé cutanée? Si ce concept est nouveau pour vous, vous serez étonné de découvrir d’abord les liens qui unissent les intestins et la peau et également de constater que la santé cutanée relève de beaucoup plus que d’une routine beauté impeccable. 

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La peau, un indicateur de l’homéostasie corporelle

Tout d’abord, il est important de savoir que la peau occupe un rôle important pour l’homéostasie de l’organisme. Considérée comme l’un des plus gros organes du corps humain, elle est le reflet extérieur du bien-être interne. En d’autres mots, les dérèglements de la peau sont généralement reliés à un désordre provenant de l’interne du corps.

Analogies entre la peau et les intestins

Il est aussi intéressant de comprendre que les intestins et la peau sont des organes très analogues de l’un et l’autre. En prenant conscience de toutes ces similarités, autant physiologiques que fonctionnelles, il est plus facile de comprendre la forte communication qu’il existe entre eux :

  • Ils sont formés d’épithéliums à jonctions serrées leur permettant d’agir comme un filtre semi-perméable entre l’externe et l’interne du corps;
  • Les entérocytes (cellules intestinales) et les kératinocytes (cellules cutanées) sont des cellules à renouvellement très rapide qui demandent un besoin accru en nutriments;
  • La peau, tout comme les intestins, possède son propre microbiote, lequel sécrète des enzymes (protéases et lipases) ayant un impact sur la peau;
  • Tout comme le microbiote intestinal, le développement du microbiote cutané est influencé par le mode de naissance (voie naturelle, césarienne);
  • Ils agissent tous les deux comme première ligne de défense au niveau de l’immunité;
  • On peut comparer le rôle du sébum cutané à celui du mucus gastrique et, une hypo ou une hypersécrétion de l’un comme de l’autre est signe de déséquilibre.

En outre, les microbiotes s’influencent par l’intermédiaire des systèmes nerveux et immunitaires ainsi que les barrières intestinale et épidermique sont reliées par la circulation systémique (sang et lymphe). Les molécules sécrétées par ces deux organes voyagent donc de façon bidirectionnelle vers l’un et l’autre. 

Ainsi, une flore intestinale déséquilibrée libère des bactéries et des molécules inflammatoires qui affectent l’homéostasie microbienne cutanée ainsi que la qualité lipidique de la couche de protection de la peau (leaky skin). Inversement, une barrière de protection cutanée altérée laisse entrer des pathogènes pouvant affecter l’équilibre microbien intestinal. La limitation de l’absorption des nutriments nécessaires à la santé de la peau est un autre phénomène mettant en lien l’influence d’une détérioration de la barrière intestinale sur la peau.

Interactions entre les intestins, la peau et le cerveau

Le lien qui unit la peau et le cerveau est plus subtil bien qu’il soit non négligeable. La peau est l’organe de première ligne pour la détection des stresseurs externes à l’organisme tels que le chaud, le froid, la douleur. Par l’entremise de fibres sensitives, elle transmet au système nerveux (constitué du cerveau) ces changements d’environnement. En réponse, celui-ci agit sur la peau, en sécrétant divers médiateurs, permettant à celle-ci de s’adapter à son nouveau milieu. 

Ce phénomène est cependant applicable pour tout stress physiologique, qu’il soit physique, émotionnel ou mental. De ce fait, un stress aigu ou chronique peut causer, par une libération de molécules inflammatoires, une altération de la barrière cutanée et un déclin de sa régénération. L’impact d’un stress psychologique sur la composition du microbiote et la perméabilité intestinale contribue également, de façon indirecte, à un déséquilibre homéostasique et une inflammation de la peau. 

Conseils pour optimiser la santé cutanée

Maintenant, par où commencer si l’on désire optimiser notre santé cutanée? Bien que pour certains cas de grandes problématiques de peau, un soutien approfondi et individualisé soit nécessaire, certaines bases sont toujours essentielles à établir. 

En premier lieu, vous aurez compris qu’il est impératif d’adresser la santé digestive. Ainsi, on visera à optimiser la qualité digestive en éliminant les aliments nuisibles au système digestif. Éviter les aliments transformés et l’excès de sucre est déjà un très bon début. La mastication et le fait de prendre le temps de manger, sans distraction, sont également deux bonnes habitudes peu coûteuses à considérer pour soutenir efficacement la saine digestion. 

En outre, veiller à diversifier sa flore microbienne intestinale par la consommation d’une variété de fruits et légumes est nécessaire pour des résultats à long terme. L’éviction de produits de beauté agressants et déséquilibrants pour le microbiote cutané ainsi que l’application d’une crème de jour protectrice adaptée à son type de peau sont non négligeables. Finalement, garder à l’esprit l’impact néfaste du stress sur la santé digestive et l’inflammation cutanée et développer des outils de relaxation à pratiquer au quotidien si nécessaire. 

L’importance d’une approche holistique

Les problèmes cutanés et les désagréments digestifs peuvent parfois être complexes et récurrents selon divers facteurs. Le point le plus important à retenir de cette lecture est que tous les systèmes du corps humain sont interreliés et qu’on y gagne rarement du positif avec une vision tunnel centrée sur un seul élément.

L’interconnexion entre la peau, les intestins et le cerveau nous apporte une preuve concrète que l’origine de la problématique et le lieu des symptômes peuvent provenir d’écosystèmes différents. Ainsi, une approche globale, qui prend en compte l’intégralité et l’individualité de chacun, est fondamentale pour de réels résultats.

Références :

  1. Gaspérini, Jéromine (2023). L’interrelation entre le microbiote intestinal et le microbiote cutané : l’équilibre ou le déséquilibre de ces écosystèmes et leur impact sur la physiopathologie cutanée, HAL open science, 104 p.
  2. De Pessemier, B. et al. Gut-Skin Axis: Current Knowledge of the Interrelationship between Microbial Dysbiosis and Skin Conditions, Microorganisms, 2021, 9(2): 353.

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