La gastronomie dans l’art de la simplicité suédoise

Par Marie-Christine Trépanier, journaliste 

Récemment, nous vous présentions deux articles sur le Lagom qui est l’art de la simplicité suédoise. En résumé, ce mode de vie nous apprend à être satisfaits de tout ce que l’on a, à être plus modestes, plus reconnaissants, à moins consommer, à être plus « écolos » et à nous réjouir des plaisirs simples de la vie.  Résultat : on nous promet plus de joie et de bonheur dans nos vies.  

Rappelons-nous que le Lagom signifie : « ni trop ni trop peu », « suffisamment », « à sa juste mesure ».  En fait, le Lagom, c’est consommer sans excès, ne pas acheter plus que nécessaire et faire des choix en pensant à la planète. Il s’agit d’une philosophie « écono » et « écolo » qui valorise une consommation sage et respectueuse de l’environnement. 

Après vous avoir présenté les aspects généraux du Lagom, puis un volet « beauté et bien-être », cette fois-ci nous nous attardons sur le volet « gastronomie » de ce mode de vie. 

ÉCOGASTRONOMIE, CUEILLETTE ET CONSERVATION  

Le Lagom se situe tout droit avec la tendance « slow ». Slow beauty, slow life, slow fashion et inévitablement slowfood! Ce mouvement écogastronomique consiste à réunir autour de la table nos préoccupations en matière d’alimentation et aussi d’environnement. 

Les Suédois aiment cultiver leur propre potager, et ils ont surtout l’habitude d’aller cueillir eux-mêmes leurs aliments qui, sans intermédiaire, passent de la nature à la table. Les familles aiment bien se réunir pour des cueillettes en forêt à la recherche de baies, d’herbes et de champignons. Framboises, myrtilles, orties, airelles ou chanterelles sont autant de trésors à mettre dans leur panier et à rapporter à la maison pour les cuisiner.  

À noter que depuis 2013, les habitants de la ville de Linköping dans l’est de la Suède jouissent de la première serre Plantagon du monde. Il s’agit d’une ferme verticale révolutionnaire qui abrite aussi un pôle d’excellence d’agriculture urbaine. Cette serre triangulaire de 54 mètres de haut domine le centre-ville et offre aux 150 000 habitants des légumes qui poussent en hauteur et qu’ils peuvent aller cueillir eux-mêmes. 

Les Suédois suivent les saisons et malgré l’importation des aliments, le long hiver dans leur pays nécessite de faire des réserves et de gérer les stocks de façon optimale. D’ailleurs, la conservation des aliments frais est une préoccupation ancestrale pour tous les Nordiques. Cette préoccupation se ressent encore aujourd’hui dans leur façon de concevoir la cuisine et les aliments.  

En l’occurrence, les fruits et les baies seront transformés en confiture ou congelés, les légumes sont conservés dans du vinaigre, la viande et le poisson sont fumés, salés ou encore marinés. 

De leurs côtés, les chefs des restaurants remplissent leurs cuisines du fruit de leurs cueillettes et conservent les aliments avec des méthodes traditionnelles qui leur donnent des saveurs bien particulières. 

Les rudes hivers marquent la conscience collective et, par le fait même, les Suédois ont une passion pour les légumes racines tels que les pommes de terre et les betteraves qu’ils stockent dans leurs caves. 

FAIRE LA CUISINE ENSEMBLE 

En Suède, tout le monde est dans la cuisine et entoure la personne qui prépare le repas. On commence la préparation en fin d’après-midi et on soupe tôt. Comme nous vous l’avons mentionné dans un article précédent, les Suédois peuvent quitter leur travail tôt et profiter de leurs soirées et week-ends pour vivre en famille. 

Traditionnellement, c’est le vendredi soir (Fredagsmys ou Cosy Friday) qui marque le début du week-end. On laisse derrière soi la semaine de travail et on se réunit autour du fourneau en famille ou entre amis. Le vendredi soir, il n’y a pas de recettes compliquées, seulement des hors-d’oeuvre à déguster devant un bon film. On s’évite ainsi de devoir laver une tonne de vaisselles en début de week-end. 

Les enfants sont toujours invités à participer à la préparation du repas. Les plus grands épluchent, les plus petits remuent, tout le monde goûte à même la casserole et les bébés observent la scène! Le moment qui précède le repas est toujours convivial.  

Durant le week-end, dans les cuisines suédoises, vous ne trouverez jamais de maman seule devant le fourneau pendant que les autres prennent un verre dans le salon. La cuisine est participative. Si l’on reçoit des amis, les invités mettent aussi la main à la pâte dans la cuisine, donnent leur avis et ouvrent la discussion. Puis, avec les grands-parents, on fait des gâteaux durant les après-midis d’hiver. La cuisine est toujours pleine et joyeuse! 

L’IMPORTANCE D’UN « VRAI » DÎNER

Contrairement à de nombreux pays où le dîner se résume à quelques sandwiches engloutis en vitesse devant l’ordinateur au travail, le dîner en Suède est un véritable repas chaud et cuisiné qu’on prend le temps de déguster. Que ce soit à l’école ou au travail, le dîner ne se prend pas sur le pouce, mais plutôt à table.  D’ailleurs, les écoles élémentaires fournissent le repas du midi gratuit à tous les élèves qui se servent généralement eux-mêmes et qui bénéficient également d’une option végétarienne. Pour le dîner pris au travail, les Suédois préparent habituellement leurs repas de la semaine en cuisinant le dimanche ou en accommodant les restes. 

L’INCONTOURNABLE « FIKA »

Le « Fika » est un incontournable de la vie quotidienne suédoise. Il s’agit d’une pause-café gourmande et totalement Lagom. C’est un véritable moment d’échange et de convivialité qui rythme les journées des Suédois. 

À 10 heures au travail, c’est « Fika Time »! Il n’y a pas de pause en solitaire devant la machine à café. Non. On se retrouve avec les collègues et souvent aussi avec le patron pour une vraie pause où l’on échange librement. 

Puis à 16 heures, en ville, les pères en congé de paternité se retrouvent pour un Fika avec leurs bébés dans un salon de thé « kids friendly ». 

Le samedi après-midi, deux amies se retrouvent pour un Fika et discutent en savourant un petit gâteau à la cannelle. En somme, en Suède, le Fika, c’est la vie! 

LA TRADITION DU PREMIER DIMANCHE DE L’AVENT 

Le premier dimanche de l’Avent, alors que s’annonce un temps de fêtes chargé, mais d’une importance capitale, les Suédois cherchent à se détendre. La tradition est de se retrouver entre amis pour boire un vin blanc chaud épicé aux amandes et aux raisins, accompagné de biscuits secs au gingembre. Ils sont alors fin prêts pour préparer les nombreux repas et célébrer en famille et entre amis durant la période des fêtes où simplicité, convivialité, partage et gaieté seront au rendez-vous! 

Source : « Le livre du Lagom :  l’art de la simplicité à la suédoise », Anne Thoumieux, Ed. Pocket